Monorail

Une ligne monorail de douze kilomètres a été construite à la fin des années soixante entre Saran et Artenay, au nord d’Orléans. Elle a servi aux essais de deux prototypes d’aérotrain construits par la société Bertin jusqu’à l’abandon du projet quelques années plus tard, malgré les impressionnants records de vitesse établis à l’époque.

Contrairement au TGV ou aux autoroutes, qui confisquent une large bande de terrain et transforment le territoire traversé, le monorail, courant sur piliers à dix mètres du sol, n’a pas reconfiguré l’espace autour de son tracé : posé en ligne droite sur les champs de la Beauce ou traversant la forêt en se jouant des chemins et des limites existantes, il n’a nécessité ni expropriation ni remembrement – tout juste quelques coupes d’arbres. Il laisse le parcellaire intact et les aires de culture inchangées, dans un curieux mélange d’égard et d’indifférence au lieu.

Quelques années avant que Smithson dessine sa jetée-spirale, on a donc tracé un trait à la règle sur une carte, on a ensuite opéré le trait in situ. Inscription d’une abstraction pure.

Abandonné mais jamais démoli (sauf, récemment, sur une portion réduite), l’ancien rail futuriste s’est en partie naturalisé avec le temps (assombrissement moussu du béton, berceau végétal – en forêt – l’enserrant de part et d’autre), cette naturalisation même augmente l’insolite du vestige.

2007
8 photographies, 80 x 160cm
tirages encres pigmentaires, encadrement bois.

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